Les leçons d’Hiroshima sur l’effet pathogène des radiations

Les bombardements atomiques d’Hiroshima puis de Nagasaki ont frappé le monde d’horreur par l’ampleur de leurs effets : cent mille morts dans chacune de ces deux villes. Cette horreur s’étend à leurs conséquences à long terme, et l’on pense généralement que les survivants irradiés ont souffert d’un taux très élevé de cancers et que leurs enfants ont été frappés par de nombreuses affections dues aux mutations produites par l’irradiation de leurs parents. La réalité est assez différente. Des études épidémiologiques à long terme ont été menées depuis 1947 (elles continuent encore) sur plus de cent mille survivants et près de quatre-vingt mille de leurs descendants ; elles montrent une augmentation nette mais relativement modérée du taux de cancers chez les survivants, dont l’espérance de vie reste proche de la normale. Quant aux enfants, il n’a jusqu’ici été détecté aucune anomalie génétique, aucune augmentation des malformations ni de la fréquence des mutations. Ces données, obtenues dans le cadre d’une fondation américano-japonaise implantée à Hiroshima et Nagasaki, on fait l’objet de plus de cent publications scientifiques et sont la base des recommandations actuelles en termes d’irradiation du public ou des travailleurs du secteur nucléaire.

L’impression relativement rassurante qui découle de ces études doit être modulée en rappelant que les bombes en cause étaient de puissance modeste, que leur effet essentiel a été le souffle et l’irradiation (les retombées ayant été très faibles) et que ces résultats concernent donc essentiellement les effets de l’irradiation externe. Les conséquences d’une contamination massive (comme à Tchernobyl) ou, bien sûr, celles d’un conflit nucléaire (qui mettrait en jeu des bombes mille fois plus puissantes que celle d’Hiroshima) seraient d’une toute autre nature…

Bertrand Jordan est Docteur en Physique nucléaire, biologiste moléculaire et généticien.

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