Découvrir ou redécouvrir Camus : fiction (1)

L’œuvre narrative de Camus comporte un ensemble de six nouvelles, L’Exil et le royaume (1957), ainsi que trois récits ou romans : L’Etranger (1942), La Peste (1947) et La Chute (1956). Ces trois récits sont des textes très différents au niveau du contenu et du style.

Dans L’Etranger, le personnage principal, Meursault, est un homme relativement jeune et indifférent bien que disposé à répondre aux demandes des autres. Sa vie s’avère banale, dépourvue d’ambition. Tout lui est égal. Ne trouvant pas de sens à la vie, il accepte son sort qui est celui de l’absurde, jusqu’au moment où il apprend la mort de sa mère. C’est par cette mort que commence le récit qui le conduira à tuer « l’autre », l’étranger. Condamné à mort, il terminera sa vie « vidé d’espoir » mais s’ouvrant «pour la première fois à la tendre indifférence du monde ».

La Peste est un long récit qui se déroulera dans un état d’esprit tout à fait différent, celui de la solidarité qui supplante enfin l’absurde. C’est sous la forme d’une chronique que le docteur Bernard Rieux relate l’apparition de la peste à Oran en 1947 et qui rassemble quelques hommes de bonne volonté (Tarrou, Rambert, Paneloux) pour combattre l’épidémie. Le récit est une allégorie du mal perpétré par le nazisme, entraînant des massacres sans fin, des millions de morts, la destruction des familles et des pays. Selon Rieux, la séparation des couples et des familles était la « souffrance la plus profonde de l’époque », le mal le plus grave. Les survivants seront marqués pour toujours du sceau indélébile de la mort.

La Chute, est un texte monologue du genre « confession » que récite le narrateur sous le nom de Jean-Baptiste Clamence. Jeune, il a eu la nostalgie du « Royaume » mais est progressivement tombé dans la déchéance. Un soir parmi d’autres, il rencontre un client au bar de Mexico-City à Amsterdam. Celui-ci devient aussitôt un interlocuteur de choix dont les réactions implicites sont toujours silencieuses pour le lecteur mais dont la nature sémiotique lui est transmise par le discours, les réactions et les gestes de Clamence. Personnage à deux visages, celui-ci se présente comme « juge-pénitent ». Dévoilant progressivement son narcissisme porté au plus haut degré par l’ironie, mais surtout par son cynisme, le « juge » est cependant hanté depuis longtemps par la « chute » d’une jeune femme tombée dans la Seine au pont Royal et qu’il n’avait pas eu le courage de secourir. Il restera prisonnier de sa hantise.

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